E    

 

 

Images d'un monde fragile

 

Exposition. Deux photographes proposent leurs visions respectives de la Chine et de Londres à la galerie « Bleu du ciel », à Lyon.

 

Édith Roux est partie au Nord-Ouest de la Chine photographier et filmer la minorité Ouïgour, musulmane et turcophone. Des « dépossédés », chassés de leurs habitations, pour de sombres raisons économiques, que l’artiste fait poser fiers et droits devant des ruines. « Je voulais représenter la destruction de la ville comme symbole de l’acculturation chinoise imposée de force. » Les lumières sont douces, les figures fragiles. Dans une superbe vidéo, par ailleurs, l’artiste jette un regard poétique sur l’ensemble de la région, jouant avec les rythmes et les percussions sonores du travail des artisans, les contrastes entre les environnements hyper-urbains et d’autres ruraux ou désertiques. C’est avec une certaine douceur, beaucoup d’humanité et une tension contenue qu’Édith Roux donne à voir une situation dramatique, et emblématique de bien des persécutions de minorités à la surface du globe.


Adam et Ève à Londres
À son travail répond celui du jeune photographe allemand Jan Stradtmann, qui présente à Lyon deux séries réalisées à Londres. La première montre des Porsche stationnées devant des immeubles cossus, où tout semble à la fois uniforme, stérile, froid. La seconde, constituée de diptyques, saisit des « traders » et des banquiers de la City pendant leur pause, dans un parc luxuriant. Se référant à la peinture classique, le photographe remet en scène une sorte de jardin d’Eden moderne et la chute de l’Ancien Testament. Ces images précises et apparemment innocentes se révèlent étrangement hantées, énigmatiques, menaçantes.

Fabien Giacomelli, Le Progrès, Lyon 11/2012